Compétences et apprentissages du Brevet en gestion positive des conflits avec et entre jeunes

Plusieurs années de pratique nous ont permis de formaliser les apprentissages et les compétences à acquérir du Brevet en gestion positive des conflits avec et entre jeunes.

Cette formation contient plusieurs modules espacés dans le temps, afin de permettre une maturation et une expérimentation des notions et des outils. Elle a pour objectif de développer les aptitudes en gestion de groupe et les attitudes éducatives des participants.

 

Concrètement, le but est qu’ils parviennent à maîtriser :

  • Des savoirs et des savoir-faire. Des techniques et grilles de lecture visant à favoriser la communication et les relations harmonieuses sont proposées aux participants. Il s’agit également de travailler à une bonne cohésion de groupe, à un cadre sécurisant et favorisant des comportements constructifs.
  • Des savoir-être. Les contenus et méthodes vus et expérimentés en formation sont liés à une posture de respect, d’ouverture, de tolérance et de confiance… Il s’agit de mener une réflexion personnelle et de développer une cohérence entre les « techniques » et la manière dont chacun se comporte, en lien avec un contexte bien défini.

Ces objectifs se déclinent en quatre compétences, présentées ici à l’aide d’exemples concrets.

S’approprier les outils de la gestion de conflits et les appliquer

La gestion de conflits implique notamment de comprendre le phénomène (ce qui se joue dans le conflit, et quelles sont les attitudes appropriées ou pas selon la personne, et le contexte de la situation). Au terme de la formation, les participants doivent par exemple pouvoir analyser une situation de conflit selon une grille permettant d’analyser leur positionnement en conflit ou celui des jeunes en fonction de plusieurs paramètres (importance des objectifs de chacun, nature de la relation, contexte…). C’est ainsi qu’ils peuvent identifier la leur ou les leurs parmi cinq grandes familles d’attitudes (compétition, accommodation, repli, compromis et collaboration) et se rendre compte de leur pertinence en fonction de la situation.

De même, les participants doivent être capables de distinguer les faits des interprétations et des jugements de valeur. Une description factuelle est indiscutable, simplement observable. Les adverbes ou encore les jugements de valeurs peuvent rendre les propos moins clairs, voire risqués jusqu’à enfermer une personne dans une étiquette (exemple : « de toute façon, avec lui, c’est toujours la même chose, il faut qu’il tape ! »). Les participants sont également amenés à s’entrainer à transformer des jugements en faits, voire à aider un enfant à revenir dans une description plus factuelle lors d’un conflit. Par exemple, Lorsqu’un enfant déclare : « Emile fait exprès de m’embêter tout le temps », l’adulte peut interroger l’enfant : que veut dire « tout le temps » ? Que fait-il qui « t’embête » ? Qu’est-ce qui te fait dire qu’il l’a fait exprès ? Une phrase plus factuelle serait « Emile m’a poussé à trois reprises dans la cour de récréation ».

De plus, les apprenants sont formés à reconnaître, analyser ce pour quoi une règle est dysfonctionnelle. Ils peuvent ainsi réécrire ou « corriger » une règle trop longue, peu claire, ayant peu de sens, etc.

Une autre aptitude consiste à être capable de « recadrer » une étiquette, c’est-à-dire à pouvoir transformer un jugement (souvent « négatif », et parfois positif aussi) à l’égard d’une personne en le nuançant, en le « dépassant ». Lorsqu’un éducateur pense que Mélanie est une enfant « difficile », sa pensée va influencer son comportement envers elle et au final susciter des résistances plus fortes chez la jeune fille, ce qui peut conforter sa croyance.

Enfin, et ce sans être exhaustif, les participants sont formés à des techniques de communication, et initiés à la négociation et médiation. Ils apprennent à formuler un « message clair » (assertivité, CNV…), à reformuler le message d’une personne (notamment lorsque ce message est de l’ordre du jugement), à lui répondre en manifestant une écoute « active », à chercher des solutions « gagnant-gagnant »…

Tous ces apprentissages ont pour finalité de fournir un bagage suffisant en gestion de conflits afin de pouvoir « jongler » avec les attitudes, les méthodes, les réactions, les postures, les pistes de solution…

Développer une cohérence dans ses attitudes éducatives

 

Il s’agit ici de développer les facultés des apprenants, non seulement comprendre et intégrer les contenus et méthodes en gestion de conflits, mais aussi à les appliquer eux-mêmes.

Ainsi, un objectif – parmi d’autres – est que les sanctions posées par l’adulte soient adéquates par rapport à la situation et au comportement de l’enfant. Celles-ci doivent avoir du sens, être « réparatrices » et non être décidées arbitrairement sous l’effet de la colère, par exemple.

De même, les participants au Brevet sont entrainés tout au long de la formation à parler sans émettre de jugement ou de message « risqué » en situation critique (ou du moins à le faire en toute conscience et en mesurant les conséquences), ou encore à identifier et à écouter leurs émotions avant de reconnaître et écouter celles des enfants.

Développer un regard critique sur l’adéquation entre les outils et les situations

De manière générale, les participants sont invités à développer leur capacité à s’adapter et à varier leurs comportements en fonction de leur public et des situations. En effet, en gestion de conflits, souvent, il n’y a pas une « réponse » type qui convient dans toutes les situations, mais plutôt un panel de réponses possibles dont certaines sont plus pertinentes que d’autres à un moment donné. Le fait d’adopter machinalement un type de réponse de manière privilégiée peut d’ailleurs être assez enfermant. C’est un travail d’équilibriste.

C’est ainsi que cette troisième compétence est d’un ordre plus réflexif. Il s’agit de pouvoir évaluer ce qui est adapté ou pas par rapport à des situations problématiques, de porter un regard critique sur les méthodes et les techniques utilisées à un moment bien précis. Cette compétence atteste d’un niveau de maîtrise supérieur de l’appropriation des outils de la gestion de conflits et de l’application de ceux-ci. Elle montre que la personne peut porter un regard réflexif par rapport à sa pratique et ainsi faire preuve d’évolution et de remise en question.

Évaluer ses propres compétences en gestion de conflits

Cette dernière compétence est également d’un ordre réflexif. Elle témoigne d’un niveau de maîtrise supérieur de ses propres attitudes éducatives. Le regard critique est ici posé non pas sur les méthodes et les contenus en gestion de conflit, mais sur ses propres forces et points à améliorer. Il s’agit d’évaluer son propre « chemin ».

Les adultes sont ainsi invités à observer la cohérence entre leurs objectifs et leurs changements. Cette aptitude à visée formative consiste à se remettre en question dans sa posture éducative. Lors de leurs mises en situation, lorsqu’ils appliquent les outils dans leurs contextes ou encore pendant une évaluation formelle, des questions leurs sont proposées. Par exemple :

Quelles sont les compétences utilisées dans ton intervention ? Quels sont les outils / compétences que tu penses moins maîtriser et que tu aurais pu utiliser ici ?

Quelles sont les compétences que tu penses avoir acquises depuis le début ? Reste-t-il des outils avec lesquels tu te sens moins à l’aise  et que tu te verrais travailler plus ?

Au terme du Brevet, les apprenants peuvent donc se situer quant à leur parcours en gestion de conflits avec et entre jeunes. Un parcours qui continue après la formation…