Le mot « agressivité » vient du latin aggredior, qui signifie « aller vers ». L’agressivité est une pulsion qui contribue à la survie de l’espèce. Elle nous pousse à nous protéger des dangers et à nous mobiliser pour atteindre nos objectifs. Puisqu’elle est naturelle, l’agressivité n’est donc ni un bien, ni un mal. C’est la manière de l’exprimer et de la gérer qui sera constructive (limites exprimées de manière socialement acceptable) ou destructrice (agression physique ou verbale).

L’agressivité peut mener à des comportements destructeurs… A moins d’être gérée de manière constructive

Dans le langage courant, l’utilisation du mot « agressivité » se substitue tantôt au mot « colère » (alors qu’elle préexiste à la colère), tantôt à l’agression violente, alors que cette pulsion instinctive peut se traduire par des comportements respectueux. Par ailleurs, la perception de ce qui est agressif et violent est subjective et liée au vécu personnel et aux normes (sociales, familiales, organisationnelles, sociétales, …) : ce qui est « agressif » et violent pour l’un, ne l’est pas forcément pour l’autre. Les techniques abordées ici sont donc à utiliser lorsque je perçois, lorsque je vis subjectivement mes comportements ou ceux des autres comme agressifs …

Qu’elle soit déclenchée par un stimulus dans l’ici et maintenant, par une accumulation soudaine ou progressive de tension ou par une tendance naturelle à dominer son entourage, l’agressivité peut être décelée grâce aux sensations physiques et au langage corporel traduisant la colère : augmentation de la fréquence cardiaque, de la température et de la tension, croissance du tonus musculaire (surtout dans les bras), crispation de la mâchoire et des poings, respiration plus forte,  sourcils froncés, yeux mi-clos, posture et bras vers l’avant, montée sonore du ton, narines dilatées, gestuelle saccadée, brusque et cassante, signes de domination, … Le but est de se montrer impressionnant pour éviter le combat, car dans le monde animal, il y a toujours un risque de mourir suite à une lutte. Au-delà de ces informations sensorielles et corporelles, les pulsions agressives se traduisent par l’assurance d’avoir raison, la certitude que l’autre a tort (« Quel con ! ») et l’envie de prendre le dessus. L’empathie des personnes « agressives » est limitée, tout comme celle des hommes préhistoriques qui, pour survivre, n’éprouvaient pas d’empathie envers les animaux qu’ils tuaient (pour se nourrir), ni envers les autres humains qu’ils chassaient de leur territoire (pour protéger leur clan).

En choisissant un moment favorable pour discuter, un endroit neutre (ni le territoire de l’autre ni le mien), et en parlant avec mon interlocuteur en privé (en dehors de tout spectateur), je préviens déjà partiellement l’escalade symétrique. Si je crains la désapprobation agressive de mon vis-à-vis, je peux aussi m’adresser à lui par courrier, par téléphone ou par mail.

Au moment de l’échange, il est utile de rester aussi calme que possible, en m’ancrant dans le sol ; en effectuant quelques respirations abdominales ; en déchargeant mes tensions sur un objet sécurisant ; en pratiquant la visualisation ou la répétition mentale de phrases apaisantes ; en me mettant dans la posture du sphinx (visage impassible et avant-bras sur la table, le bureau ou les cuisses) ; en utilisant la technique du poisson froid (compter jusqu’à 5 dans ma tête avant de répondre à l’agresseur) ; …

En cas d’agressivité, il est déconseillé de toucher ou de s’approcher de l’interlocuteur, même dans l’intention louable de le calmer avec douceur. Au lieu de cela, il est possible de :

  • Créer son espace pour mieux réfléchir, quitte à reculer d’un pas, à faire un pas de coté, à se lever,…
  • Mettre un obstacle entre les parties en conflit (une table, la voiture, une porte, …).
  • S’éloigner lentement, sans tourner le dos et en restant dans la pièce.
  • Ouvrir une porte ou se rapprocher d’une porte ouverte.
  • Partir en cas de danger.

Une position solide et ouverte aide à calmer le jeu : se mettre de ¾ (le face à face augmente le rythme cardiaque) ; si possible s’asseoir (il est plus difficile de s’énerver assis) ; garder une gestuelle et une voix calmes ; montrer des signes d’écoute et reproduire partiellement la colère (sourcils froncés, bouche en avant, léger haussement de ton, …), afin de se mettre en empathie avec le ressenti de l’interlocuteur ; regarder l’interlocuteur dans les yeux (ou sur le front si je suis mal à l’aise) quand il parle, et détourner le regard sur les côtés quand je lui réponds ; m’exprimer en peu de mots, avec une voix calme et posée (les personnes en colère ne sont pas capables de traiter mentalement un débit de paroles rapide) ; …

Une fois la posture adaptée, je peux choisir l’une ou l’autre de ces stratégies :

  • Valider l’agressivité : confirmer ce qui est vrai et juste pour moi ; accueillir la manière dont l’autre vit les choses ; répondre brièvement (« Ouf ! », « Ah oui. », « Eh ben … »), en notant les commentaires désagréables pour mieux y revenir plus tard ; reformuler l’essentiel des propos (les mots cités en haussant le ton ou les répétitions) ; …
  • Questionner la colère : clarification générale (technique du « Oui, et … ? ») ; enquête négative (« Je t’ai répondu … Tu as autre chose à me dire ? ») ; questionnement du message clair (fait, émotion et souhait concret) ; …
  • Refuser l’agression : refus de forme ; désaccord sur le fond ; référence au cadre (loi, procédures, règles) ; arrêt de la discussion (quitte à la post-poser) ; …
  • Décontenancer : ignorer consciemment ; changer de sujet ; gagner du temps ; pratiquer la technique du brouillard ou de l’édredon ; faire preuve d’humour (dramatisation, preuve par l’absurde, auto-dérision, ironie, …) ; montrer une attitude décalée ; recadrer en donnant une signification positive à ce qui m’est reproché ; …

Ces techniques sont abordées lors de mises en situation à la formation « Faire face à l’agressivité ».