« Regards croisés » sur l’éducation à la Paix… même (et surtout) en temps de guerre.

En 1991, François Bazier, représentant l’Université de Paix se rendait au Liban. La guerre civile qui avait débuté en 1975 se terminait à peine.
A l’initiative de ‘l’Association sociale culturelle’ (ASC) fondée par Ogarit Younan et Walid Slaybi, tous deux pionniers de la non-violence, des pacifistes  de nombreux pays se retrouvaient alors pour partager leurs approches du conflit -de sa prévention, à sa gestion et à la réparation nécessaire après la guerre-. Une session de formation à la Non-Violence a  ainsi réuni pendant  15 jours plus de septante personnes, jeunes engagés dans des groupes sociaux et culturels, issus de tous les milieux du Liban.

C’est ainsi que, depuis lors, les programmes éducatifs de l’Université de Paix, dont ‘Graines de Médiateurs’ contribuent modestement aux efforts de paix au Liban et plus largement, au Proche-, Moyen-Orient et en Afrique.

« Tout est parti d’un rêve, d’une vision. Et aujourd’hui cet effort de paix a fait tache d’huile. L’éducation a la paix est à présent instituée au Liban», Ogarit Younan.

L’ASC, devenue ensuite l’AUNOHR (Université arabe pour la non-violence et les droits humains) a ainsi formé des milliers de formateurs bénévoles, d’abord au Liban puis aujourd’hui dans toute la région.

Ces formateurs ont à leur tour, semé des graines de paix et appris aux enfants et adultes de leur pays, que la guerre pouvait être évitée, ou réparée, grâce au dialogue. Des centaines d’écoles non-violentes ont ainsi vu le jour et des étudiants de tous pays, de l’Algérie à l’Ethiopie, de l’Egypte à l’Irak, de toutes confessions, continuent de se former à ces pratiques non-violentes.

Aujourd’hui encore, l’AUNOHR et l’Université de Paix travaillent dans la même direction au maintien de la Paix par l’éducation au dialogue et à la non-discrimination confessionnelle.

Le parallèle avec la guerre actuelle en Ukraine nous semble avoir tout son sens. Ainsi, bien que n’étant pas spécialistes en géopolitique, plutôt que nous sentir impuissants, nous pouvons continuer à nous positionner contre cette guerre et encourager, chacun à notre niveau, la voix du dialogue et éduquer au dialogue.

Comme le disait déjà Dominique Pire, fondateur de l’Université de Paix en 1960, « la Paix est bien plus que le silence des canons ». Ainsi, alors qu’il appartiendra aux organes de la justice internationale de juger les crimes de cette guerre, nous pouvons, chaque jour, travailler à « désarmer les esprits et les cœurs ».

Tirons les leçons du passé et souvenons-nous que toutes les guerres sont perdues. Qu’elles affectent des générations entières ; que le traumatisme des familles divisées, séparées, endeuillées est immense et tellement long à réparer.

La Paix n’est pas un état de fait mais un chemin. Un chemin en nous et entre nous, auquel nous pouvons former nos enfants, aujourd’hui et chaque jour. Pour choisir nos ressemblances plutôt que nos différences, pour apprendre à vivre ensemble et à faire ensemble. Pour apprendre à exprimer ses émotions en mots plutôt qu’en coups, à écouter les besoins de l’autre, à être bienveillant.

Car comme le dit Amin Maalouf dans le magnifique documentaire de Pierre Pirard ‘Nous Tous‘, « la question n’est pas de savoir SI nous allons vivre ensemble ou pas, mais bien COMMENT nous voulons vivre ensemble ».