Par Jean-François Lecocq, Formateur en Communication Nonviolente (2011).

Le « talkie-walkie », connaissez-vous ? C’est un petit émetteur-récepteur de radio portatif qui se présente comme un téléphone et qui permet d’avoir une communication dite « half duplex », c’est-à-dire une communication dans les deux sens, mais pas simultanément. Pour parler, donc émettre, il faut appuyer sur un bouton et pour entendre, donc recevoir, il faut relâcher le bouton. L’autre personne, ayant le même appareil réglé sur la même fréquence radio, fait de même pour communiquer avec vous. Inventé en 1941 par l’ingénieur canadien Donald Hings travaillant chez Motorola, c’est un peu l’ancêtre du gsm actuel, mais indépendant du réseau téléphonique.

Or depuis lors, on a découvert que la communication humaine fonctionne exactement comme un talkie-walkie. Soit nous parlons, soit nous écoutons, mais nous ne savons pas faire ces deux choses-là en même temps, alors même que le commun des mortels se croit capable de le faire tout le temps !

Dans le processus de la Communication Nonviolente modélisé par Marshall Rosenberg, on apprend à distinguer ces deux temps de la communication par l’emploi des termes : « expression honnête de soi » et « écoute empathique de l’autre ». Viennent ensuite quatre étapes qui sont :

  • premièrement, l’observation des faits ;
  • deuxièmement, les ressentis ;
  • troisièmement, les besoins en jeu ;
  • et enfin quatrièmement, les demandes susceptibles de rencontrer ces besoins mis à jour.

Si l’on ajoute le fait qu’il est parallèlement utile de toujours garder le sens de la communication avec soi-même, c’est-à-dire de savoir toujours garder un oeil sur soi -on appelle cela « auto-empathie » en Communication Nonviolente- avec les quatre étapes qui s’y rapportent également, cela fait pas moins de 12 possibilités où mettre son attention dans la communication. Il n’y a pas lieu de s’étonner que le petit walkie-talkie que nous sommes s’y perd bien souvent !

Pour clarifier la complexité de ce qui est ainsi en jeu dans la communication, de nombreux moyens pédagogiques ont été imaginés et sont utilisés dans les formations en Communication Nonviolente : schémas, dessins, exercices structurés, jeux de rôles, utilisation de chaises, etc.

Deux formatrices anglaises en Communication Nonviolente, Bridget Belgrave et Gina Lawrie, ont imaginé mettre tout cela sur de grandes cartes de différentes couleurs disposées au sol et sur lesquelles on se déplace, chaque carte disposée au sol représentant un pas dans une sorte de danse de communication. Cela permet d’explorer la complexité d’une communication d’une façon ludique, originale et inspirante. Cette représentation spatiale a abouti à la création de ce qu’on appelle les « Pistes de Danse CNV ».

Il existe actuellement neuf danses CNV, chacune d’entre elles étant conçue pour développer les prises de conscience et les compétences dans un domaine particulier de communication. Quatre d’entre elles sont des « Danses Intérieur-Extérieur » permettant à chaque instant de choisir entre différentes options, d’aller et venir, de reculer ou même de sauter d’un temps à un autre, et d’explorer ainsi d’une façon créative un dialogue interpersonnel authentique en jeu de rôles. Les cinq autres sont des « Danses Intérieur » permettant une transformation personnelle en accédant à ses ressources intérieures grâce à une connexion empathique bienveillante avec soi-même.

J’ai eu la chance de rencontrer Bridget Belgrave au cours d’une formation qu’elle a donnée en France en ce début d’année 2011 et j’ai été impressionné par ce qu’elle m’a fait découvrir. J’ai eu l’occasion d’y découvrir sous un nouveau jour diverses situations de communication, dont une dont j’avais gardé un souvenir assez pénible et dont la solution m’est apparue avec une soudaine clarté. J’en suis resté stupéfait et émerveillé. J’ai découvert que bien au-delà d’une compréhension mentale, la pratique des « Pistes de Danse CNV » peut faciliter l’accès à une compréhension corporelle claire, souple, profonde, une conscience vivante de la communication.

Aussi j’ai le goût de partager ce que j’ai appris avec les personnes qui seraient attirées par vivre quelques-unes de ces danses. C’est pourquoi j’ai proposé à l’Université de Paix d’introduire une telle activité dans son nouveau programme sous le titre « Communiquer… C’est comme danser ! ». A qui le tour ?